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SECURITE GENERALE DES PRODUITS RSGP

SECURITE GENERALE DES PRODUITS RSGP
21 mars 2024  |  François Ponthieu, Alicia Dode

ARTICLE SUR LE REGLEMENT (UE) 2023/988 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 10 MAI 2023 RELATIF A LA SECURITE GENERALE DES PRODUITS

PRESENTATION GENERALE

  1. Dans le cadre de son entrée en application le 13 décembre 2024, il est opportun de s’intéresser au nouveau Règlement sur la sécurité générale des produits (« RSGP ») qui vient remplacer la directive sur la sécurité générale des produits[1] et celle sur les produits ayant l’apparence de denrées alimentaires[2].
  2. Le RSGP est un nouvel instrument juridique qui vise à moderniser le cadre général posé par l’Union européenne (« l’UE ») en matière de sécurité des produits. Il répond aux nouveaux défis posés par la numérisation croissante et l’évolution des nouvelles technologies en la matière, notamment l’essor des ventes en ligne.Son objectif est de faire en sorte que tous les produits de consommation sur le marché de l’UE soient « sûrs », c’est-à-dire qu’ils « ne présente[nt] aucun risque ou seulement des risques minimaux compatibles avec [leur utilisation] et considérés comme acceptables dans le respect d’un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des consommateurs », conformément à la définition posée par l’article 3, point 2), du RSGP.
  3. Le RSGP s’applique aux produits non alimentaires neufs, d’occasion, réparés ou reconditionnés, qu’ils soient vendus hors ligne ou en ligne. Il permet d’appréhender des risques qui ne sont pas spécifiquement réglementés par d’autres actes législatifs de l’UE.
  4. Comme tout règlement européen, le RSGP est un acte juridique, obligatoire dans toutes ses dispositions, qui s’impose à tous les sujets de droit. Contrairement aux directives qui délèguent le choix des moyens et qui doivent être transposées dans le droit national de chaque Etat membre, le RSGP est directement applicable dans tous les Etats membres ; il fixe un objectif (la sécurité des produits, donc), mais également les moyens pour l’atteindre.

Parmi ces moyens, il apparaît essentiel de citer :

I – L’EVALUATION DE LA SECURITE DES PRODUITS

  1. En vertu de l’article 6, paragraphe 1, du RSGP, il convient, pour procéder à l’évaluation de la sécurité d’un produit, de prendre en compte divers éléments, tels que ses caractéristiques, son effet sur d’autres produits, l’effet que d’autres produits pourraient avoir sur lui, sa présentation et son étiquetage, les catégories de consommateurs qui l’utilisent, son apparence et enfin, lorsque sa nature l’exige, ses caractéristiques de cybersécurité et ses fonctionnalités.
  2. En outre, l’article 8 du Règlement énumère des éléments supplémentaires qui peuvent être pris en compte pour l’évaluation de la sécurité d’un produit, dont « l’état actuel des connaissances et de la technique, y compris l’avis d’organismes scientifiques et de comités d’experts reconnus » (point g), paragraphe 1er).

Il appartient aux différents opérateurs économiques concernés d’évaluer la sécurité des produits qu’ils commercialisent.

II – LES OBLIGATIONS DES DIFFERENTS OPERATEURS ECONOMIQUES

  1. 1. Les fabricants
  1. Le fabricant est qualifié par l’article 3, point 8), du RSGP comme « toute personne physique ou morale qui fabrique, ou fait concevoir ou fabriquer un produit, et le commercialise sous son propre nom ou sa propre marque ».
  2. Afin d’assurer le respect de l’obligation générale de sécurité prévue par l’article 5 du RSGP, l’article 9 de ce texte liste les différentes obligations qui s’imposent aux fabricants.

8.1. Une des obligations les plus significatives consiste dans le fait pour les fabricants de devoir réaliser « une analyse interne des risques et […] une documentation technique contenant au moins une description générale du produit et de ses caractéristiques essentielles pertinentes pour l’évaluation de sa sécurité », conformément au paragraphe 2 de l’article précité.

Cette documentation doit être à jour et tenue « à la disposition des autorités de surveillance du marché pendant une durée de dix ans à compter de la date de mise sur le marché du produit », comme le précise le paragraphe 3 de l’article 9 du Règlement.

8.2.  Les fabricants sont également tenus de s’assurer que les produits qu’ils vendent dans l’UE respectent les exigences posées en matière d’étiquetage.

8.2.1. Comme rappelé au point 5 ci-dessus, l’étiquetage représente un des éléments d’évaluation de la sécurité des produits ; il doit par conséquent mentionner plusieurs informations.

8.2.2. L’article 9, paragraphe 5, du RSGP prévoit ainsi que « les fabricants veillent à ce que leurs produits portent un numéro de type, de lot ou de série ou tout autre élément permettant l’identification du produit et que le consommateur peut aisément voir et lire ou, lorsque la taille ou la nature du produit ne le permet pas, à ce que les informations requises figurent sur l’emballage ou dans un document accompagnant le produit ».

8.2.3. Le paragraphe 6 de l’article précité poursuit en affirmant que « les fabricants indiquent leur nom, leur raison sociale ou leur marque déposée, leur adresse postale et électronique et, si elle est différente, l’adresse postale ou électronique du point de contact unique à laquelle ils peuvent être contactés. Ces informations sont placées sur le produit ou, lorsque cela s’avère impossible, sur son emballage ou dans un document accompagnant le produit ».

8.2.4. Le paragraphe suivant de ce même article indique que « les fabricants veillent à ce que leur produit soit accompagné d’instructions et d’informations de sécurité claires rédigées dans une langue aisément compréhensible par les consommateurs, déterminée par l’État membre dans lequel le produit est mis à disposition sur le marché ».

Ces dispositions, auxquelles tous les fabricants sont tenus de se conformer, visent donc à assurer :

8.3. Si un fabricant estime qu’un des produits qu’il a mis sur le marché est dangereux, autrement dit qu’il n’est pas « sûr » car il ne répond pas aux exigences fixées par la définition précitée de l’article 3, point 2) du Règlement, il a l’obligation de suivre la procédure énoncée à l’article 9, paragraphe 8, du RSGP.

Cette procédure consiste à prendre « les mesures correctives nécessaires pour mettre le produit en conformité de manière efficace » et à informer les consommateurs, ainsi que les autorités de surveillance du marché, des risques encourus du fait de la mise à disposition du produit dangereux sur ce marché.

8.4. Les paragraphes 11 et 12 de l’article 9 du RSGP obligent quant à eux les fabricants à mettre des « canaux de communication » à la disposition du public afin que les consommateurs soient en capacité « d’introduire des réclamations », qui devront être tenues par les fabricants dans un « registre interne ».

  1. 2. Les mandataires
  1. Le mandataire est défini par l’article 3, point 9), du RSGP comme « toute personne physique ou morale établie dans l’Union ayant reçu mandat écrit d’un fabricant pour agir pour son compte aux fins de l’accomplissement de tâches déterminées qui sont liées aux obligations incombant au fabricant au titre du présent règlement ».
  2. Conformément à l’article 10 du RSGP, les mandataires doivent être désignés par un mandat écrit et doivent exécuter les tâches mentionnées dans ce document reçu par un fabricant. Ils sont tenus d’apporter les preuves qu’un produit est sûr à toute autorité de surveillance de marché qui le leur demande, d’informer le fabricant s’ils estiment qu’un produit est dangereux, ainsi que d’informer et de coopérer avec les autorités nationales compétentes en cas de mesure prise pour tenter d’éliminer les risques liés aux produits couverts par leur mandat.La pratique montrera sans doute que les mandataires auront surtout pour tâche de représenter les entreprises établies hors UE.

II.3.  Les importateurs

  1. « Toute personne physique ou morale établie dans l’Union qui met sur le marché de l’Union un produit provenant d’un pays tiers » peut être qualifiée d’importateur, conformément à la définition posée par l’article 3, point 10), du RSGP.
  2. La principale obligation qui incombe aux importateurs (outre peut-être de remplir également la fonction de mandataire) est de vérifier que le produit qui va être mis sur le marché respecte l’obligation générale de sécurité et que le fabricant du produit en question a procédé à :
  1. En outre, l’article 11 du Règlement énumère plusieurs obligations supplémentaires auxquelles les importateurs sont tenus de se conformer, telles que la coopération avec les autorités de surveillance du marché et le fabricant, ou encore la vérification de la disponibilité des canaux de communication pour les consommateurs.

II.4. Les distributeurs

  1. Le distributeur est défini par l’article 3, point 11), du RSGP comme « toute personne physique ou morale faisant partie de la chaîne d’approvisionnement, autre que le fabricant ou l’importateur, qui met un produit à disposition sur le marché ».
  2. La principale obligation qui incombe aux distributeurs (outre peut-être également celle d’agir en tant que mandataire) est de veiller à ce que le fabricant ou l’importateur du produit qui va être mis à disposition sur le marché ait procédé à :
  1. En outre, l’article 12 du Règlement énumère des obligations supplémentaires auxquelles les distributeurs sont tenus de se conformer. A titre d’exemple, ils doivent veiller aux « conditions d’entreposage ou de transport » des produits étant sous leur responsabilité afin de ne pas nuire à la sécurité de ces derniers, conformément au paragraphe 2 de l’article précité.

II.5. Les obligations de l’ensemble des opérateurs économiques

  1. En vertu des articles 14 et 15 du RSGP, tous les opérateurs économiques doivent disposer de processus internes liés à la sécurité des produits et coopérer avec les autorités de surveillance du marché. De cette obligation de coopération résulte des exigences en matière de traçabilité. En effet, d’après les termes de l’article 15, paragraphe 3, du RSGP, les autorités de surveillance du marché peuvent notamment exiger des opérateurs économiques des informations concernant « tout opérateur économique qui leur a fourni le produit, ou une pièce, un composant ou tout logiciel intégré dans le produit» mais aussi « tout opérateur économique auquel ils ont fourni le produit ».

De plus, l’article 18 du Règlement pose des exigences spécifiques de traçabilité pour certains produits susceptibles de présenter un risque grave pour la santé et la sécurité des consommateurs.

  1. Dans la mesure où tout produit couvert par le RSGP ne peut être mis sur le marché que s’il existe un opérateur économique établi dans l’UE qui a la responsabilité des tâches visées au paragraphe 3 de l’article 4 du Règlement (UE) 2019/1020[3], la nomination d’une « personne responsable des produits mis sur le marché de l’Union » (pour reprendre les termes de l’article 16 du RSGP) est nécessaire pour les opérateurs économiques établis hors de l’UE qui commercialisent leurs produits sur le marché de l’Union. Il semble découler du RSGP que cette personne responsable puisse notamment être le mandataire dont les fonctions ont été rappelées ci-dessus – mais aussi tout autre opérateur économique, et par exemple l’importateur.
  2. En cas de vente à distance ou d’accidents liés à la sécurité des produits, diverses obligations particulières d’information pèsent sur les opérateurs économiques, conformément aux articles 19 et 20 du RSGP.

III- LES OBLIGATIONS DES FOURNISSEURS DE PLACES DE MARCHE EN LIGNE

  1. Le fournisseur d’une place de marché en ligne est défini par l’article 3, point 14), du RSGP comme étant « un prestataire de services intermédiaires utilisant une interface en ligne qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels pour la vente de produits ».
  2. L’article 22 du Règlement énumère plusieurs obligations spécifiques auxquelles les fournisseurs de places de marché en ligne doivent se soumettre pour assurer la sécurité des produits.

Parmi ces obligations figure la désignation d’un « point de contact unique permettant une communication directe, par voie électronique, avec les autorités de surveillance du marché des Etats membres », la mise en place de « processus internes », le traitement des « notifications relatives à des problèmes de sécurité des produits proposé[s] […] à la vente en ligne par l’intermédiaire de leurs services », la fourniture de multiples informations, ou encore la suspension de « la fourniture de leurs services aux professionnels qui proposent fréquemment des produits non conformes au présent règlement ».

  1. Les fournisseurs de places de marché en ligne font l’objet d’un chapitre entier du RSGP (chapitre IV) ; cet élément prouve une réelle volonté d’assurer la sécurité des produits vendus en ligne.

IV – LE DEVELOPPEMENT D’UN SYSTEME D’ECHANGE RAPIDE D’INFORMATIONS

  1. Le RSGP permet la mise en place d’un système d’échange rapide d’informations entre les différents acteurs économiques afin de garantir une surveillance plus efficace du marché de l’Union ; ce système est composé de plusieurs outils.

23.1.    Un « Système d’Alerte Rapide Safety Gate » rend possible l’échange entre les Etats membres de mesures correctives prises concernant des produits dangereux.

Ce système permet une notification quasi immédiate des produits considérés comme présentant un risque grave pour la santé et la sécurité des consommateurs, qui doit être effectuée « dans les quatre jours ouvrables suivant l’adoption de la mesure corrective » pour répondre à l’objectif de rapidité, précise l’article 26, paragraphe 4, du RSGP.

23.2.Un « Point d’Accès Safety Business Gateway » permet aux opérateurs économiques et aux fournisseurs de places de marché en ligne, au moyen d’un portail internet, de fournir aux autorités de surveillance et aux consommateurs des informations sur les produits dangereux et les accidents.

La notification en cas d’accidents liés à la sécurité des produits doit se faire, « sans retard injustifié à compter du moment [de la] connaissance de l’accident, aux autorités compétentes de l’État membre où l’accident s’est produit » (pour reprendre les termes de l’article 20 du RSGP).

23.3.Un « Portail Safety Gate » donne un accès libre à diverses informations pour le grand public.

Cet outil met également à disposition des consommateurs un moyen de déposer des réclamations lorsqu’ils estiment qu’un produit pourrait présenter un risque pour la santé et la sécurité de ses utilisateurs, conformément à l’article 34, paragraphe 3, du RSGP.

  1. L’article 30 du Règlement décrit le fonctionnement du « Réseau pour la Sécurité des Consommateurs » et mentionne que ce réseau européen a pour objectif « de servir de plateforme pour une coordination et une coopération structurées entre les autorités des États membres et la Commission afin de renforcer la sécurité des produits dans l’Union ».

V – L’AMELIORATION DES PROCEDURES DE RAPPEL DES PRODUITS DANGEREUX

  1. Une procédure de rappel consiste à demander aux consommateurs de rapporter un produit qui se révèle dangereux.
  2. Afin d’informer l’ensemble des consommateurs en possession d’un produit faisant l’objet d’un rappel, les opérateurs économiques et les fournisseurs de places de marché en ligne doivent procéder à « une notification directe sans retard injustifié », comme rappelé par l’article 35, paragraphe 1er, du RSGP.

Les données à caractère personnel collectées peuvent être utilisées pour parvenir à effectuer ce contact direct, à condition qu’elles le soient dans cet unique but.

  1. Un avis de rappel est un document écrit qui a pour objectif de communiquer aux consommateurs les informations relatives au rappel d’un produit. Cet écrit doit respecter certaines exigences, listées à l’article 36 du Règlement, pour que le rappel soit opérant.

La Commission met à disposition des opérateurs économiques un modèle d’avis de rappel, afin de faciliter la rédaction d’un tel document.

  1. Les opérateurs économiques responsables d’un rappel de produit pour des raisons de sécurité sont tenus d’offrir aux consommateurs concernés « un recours efficace, gratuit et rapide », conformément à l’article 37, paragraphe 1er, du RSGP.

Le consommateur doit alors avoir le choix entre au moins deux des solutions suivantes :

***

En conclusion, afin que tous les produits non alimentaires sur le marché de l’UE soient sûrs, le RSGP, tout en fixant des éléments d’évaluation de la sécurité des produits et en développant un système d’échange rapide d’informations, impose de nombreuses obligations aux différents opérateurs économiques, dont la mise en œuvre de rappels efficaces.

En vertu de l’article 44 du Règlement, il revient au Etats membres de fixer un régime de sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » en cas de de violation des dispositions du RSGP.

Toutefois, les opérateurs économiques disposent encore de plusieurs mois pour assurer leur conformité au RSGP, ce dernier devenant applicable seulement à partir du 13 décembre 2024.

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[1] DIRECTIVE 2001/95/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 3 décembre 2001

[2] DIRECTIVE 87/357/CEE DU CONSEIL du 25 juin 1987

[3] RÈGLEMENT (UE) 2019/1020 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 20 juin 2019